À 25 ans, Gilles Verhaegen, alias Mewhy, son nom de scène, signe récemment deux titres inspirés et introspectifs.  Rencontre à Bruxelles avec le nouveau Coup de cœur des Médias Publics francophones, un artiste prometteur.

Article : Sabine Cessou,RFI Musique – 14/03/2023

Un jeune homme avenant, sympathique et simple comme les Bruxellois savent l’être, arrive au rendez-vous qu’il a donné à la Gare maritime, un bâtiment massif de briques et de fer, à l’écart du centre-ville. C’est là, au café-concert dénommé Baixu, qu’il donnera un concert le 7 avril et fera découvrir les titres d’un album à paraître en août ou septembre.

D’ores et déjà, les deux titres introspectifs qu’il a livrés lui valent d’être remarqué. Outre le single Pourquoi moi ?, (« Coup de cœur des MFP »), la chanson Tout contrôler est jouée avec sensibilité en acoustique au ukulélé, mais aussi diffusée en version électro et en remix.

Une enfance bruxelloise dans un milieu musical

Gilles Verhaegen, s’il devait se décrire en trois mots, dirait : « Curieux, rigoureux, contemplatif ». Il a été bercé avec ses frères cadets dans la musique, dans un milieu familial artistique de la Belgique francophone. Sa mère, Geneviève Laloy, chante pour le jeune public, joue de la flûte et enseigne, tandis que son père, qu’il décrit comme un « couteau suisse », a un parcours d’activités variées dans le monde des arts.

Ses influences musicales sont celles de ses parents : la France des années 1980, plus Jacques Brel. « Michel Jonasz, Alain Souchon, Francis Cabrel sont mes dieux français, et du côté anglo-saxon, j’écoute Elton John, Sting et Paul Simon, que j’aime vraiment beaucoup ».  

Depuis l’adolescence, il écrit ses chansons au piano « et d’abord en ‘yaourt’, une langue faite ‘d’anglais-eke’ (‘un petit anglais’, NDLR). J’ai toujours eu des mélodies, avec des textes qui viennent plus tard, mais l’inverse s’est produit sur mon premier album. Le texte est mis en avant ».

Une année de grand voyage anglo-saxon

Il se dit très mauvais en flamand, comme beaucoup de ses compatriotes francophones. Mais la musique, clairement, est son langage et sa vocation. « Depuis toujours, c’est la chose principale avec la nature qui me permet de me reconnecter à moi-même et ce qui m’entoure ». Cet amoureux des bois, qui aime parler aux arbres, va parfois avec son hamac dans la forêt, pour y passer la nuit.

Après son bac, il a tenté une année de sciences humaines à l’Université libre de Bruxelles (ULB), sans plus ni affinités. Le système scolaire ou universitaire, avec sa discipline, la « privation de liberté et le stress des examens », n’est pas vraiment sa tasse de thé. Il part à 18 ans pour faire un grand voyage, pendant un an – un rituel d’émancipation courant dans les pays du Nord. Il prend son sac à dos et des cours d’anglais à Oxford, loge chez l’habitant puis fait du coach surfing, au jour le jour, avant de s’envoler pour l’Australie. « Pour la première fois, je me suis senti en accord avec moi-même, vraiment du pur bonheur ». Il se débrouille six mois le long de la côte Ouest, en travaillant et multipliant les rencontres avec d’autres voyageurs.

Un rapport ambigu avec la solitude

Au retour, il retrouve « sa zone de confort » à Bruxelles et tout ce qui le met à l’aise : « le regard de ma mère, mes frères, la culture ici ». Il a étudié un an au Jazz Studio à Anvers et pendant six mois, à l’Institut SAE de Bruxelles, la production de musique électronique, après avoir déjà produit ses deux premiers EPs.

Il se méfie des étiquettes et ne s’identifie pas à une scène bruxelloise brillante, qui a raflé les Victoires de la musique 2023, avec Stromae et Angèle, mais aussi Pierre de Maere, Révélation de l’année. « C’est génial, mais qu’on vienne du Zimbabwe ou de l’Antarctique, la musique parle et la musique prime. Je ne suis pas du genre à dire qu’on est les meilleurs ».

Il mentionne au fil de la conversation sa timidité, sa curiosité et son rapport ambigu avec la solitude, qu’il définit comme « le fait d’être seul dans un monde. D’où la question existentielle, pourquoi moi, pourquoi être ? » Il parle aussi son côté mélancolique, « la belle tristesse, ce qui fait pleurer de joie et fait heureusement mal ». C’est le leitmotiv de son album, écrit avec minutie autour de dix questions existentielles, la première étant celle de la mort. « J’ai fait des recherches pendant un mois sur chaque thème et écrit assez cash en français, et par le biais de petites histoires, des fables en anglais ».

Alors qu’il pense déjà à son second opus, qui va plutôt partir de fulgurances et où il associera des musiciens, sans jouer de tous les instruments lui-même, ses envies consistent à vivre de son art et construire un « combo musique-nature » en créant un espace dans la forêt pour réunir des artistes. À suivre !

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